Cueillir des instants fragiles
Il fallait les bottes ce matin pour se promener au jardin. Le fond de l'air était un peu frais mais déjà les premiers rayons du soleil faisaient briller les goutelettes de rosées et les dentelles de ces dames les araignées. Elles avaient travaillé toute la nuit pour orner les prémices de l'automne d'argent ciselé. Je suis allée cueillir ces instants magiques et fragiles en savourant le bonheur de pouvoir le faire. Plus j'avance en âge et plus je goûte la magie du bonheur. Il est là à portée de nos sens, il suffit de s'ouvrir à lui.
Je pleure les horreurs de la guerre, en Irak, en Syrie, la misère des réfugiés coupés de leur patrie et traités de façon indigne. Je pleure sur la disparition des forêts, sur la bêtise de l'homme, je m'indigne et j'enrage devant la surdité des politiques. Et pourtant...
Je m'émerveille de pouvoir marcher au petit matin dans la rosée de mon jardin en écoutant les chants d'oiseaux. Je m'émerveille d'avoir trois enfants aimants et profondément gentils et deux petites filles adorables et plus belles l'une que l'autre pour me faire des câlins. Je m'émerveille d'avoir un compagnon à mes côtés pour épancher mes chagrins et me construire de jolis hôtels à insectes. Je m'émerveille de pouvoir chanter et peindre et tricoter. J'ai cette chance inouïe, surtout de pouvoir m'émerveiller de tout cela.